vendredi 20 février 2015

Voyage en pirogue à balancier


Lundi matin




 Sept heures. La pirogue est chargée de nos bagages et de tout le matériel nécessaire pour ces quatre jours prévus en mer. Le soleil est de retour. Pas de vent. Il faudrait le vent du sud, celui qui permet d’avancer vite. La pirogue à balancier n’a qu’une seule voile. C’est elle seule qui reçoit le vent nécessaire pour faire glisser la pirogue. Félix et Olion sont obligés de pagayer assez souvent. Parfois le vent souffle puis ensuite il faiblit compromettant notre avancée. L’arrivée à notre première étape, le village de Salary, parait compromise. De plus, un orage se forme au loin et se dirige sur nous. Nous arrivons à marée basse dans un lagon. La pirogue effleure parfois le fond. Obligés de pousser la pirogue. Notre progression est trop lente. 15H de l’après-midi et notre distance parcourue depuis ce matin se résume à 40 kilomètres sans un arrêt et sans manger! Félix et Orlon sont épuisés. Au prochain village, la pirogue se pose sur le sable. Après échangeavec Félix, nous décidons de faire étape ici. Pas d’hébergement dans le village. De plus, il est à 2 km de la plage. Bivouaquons alors. La voile va servir de tente une fois installés le mât et la baume servant d’ossature. Le campement est installé. Feu sur la plage pour préparer le repas qui est frugal, riz et pommes de terre avec poissons du jour. Nous sommes épuisés. Allons nous coucher. Tout habillé. Le sol est dur même sur nos paillasses qui nous isolent quand même de l’humidité du sable. Le ciel est clair. La croix du sud est là devant nous. Seulement visible dans l’hémisphère sud. Regarder le spectacle du ciel et puis fermer les yeux…
 
 


 

 

Mardi matin
 
 


Il est six heures. Espérer des vents meilleurs. Celui qui vient du sud. Celui qui fait gonfler la voile. Pousse la pirogue qui glisse à vive allure. Mais rien de tout cela. Le vent est nord-est, nord-ouest. Nous longeons la côte. Ponctuée par des villages de pêcheurs Vezo. Ils sont en mer. Ballet quotidien de leurs embarcation, petites ou grandes pirogues, qui une fois arrivées au bon endroit, se posent et la pêche commence. Le soleil tape fort. Il nous brûle la peau. Se protéger au maximum de la réverbération. La pirogue avance doucement. Pas plus qu’hier. Vent dominant du nord. Le ciel se charge peu à peu, devient noir. La pirogue tente de filer sur l’eau pour rejoindre un village. C’est Salary. Cette étape était censée se faire en une journée. Il nous aura fallu deux jours avec plus de dix heures passées dans la pirogue sans s’arrêter ! A peine le temps de décharger nos affaires, l’orage se fait tonitruant. Nous sommes au sec installés dans de petites chambres, seul lieu d’hébergement du village. Soufi nous accueille chaleureusement. Il parle très bien le français. Il se joint à nous pour le repas. Echangeons sur les conditions de vie des Vezo. Quant aux enfants, ils ne vont pas à l’école. Ils préfèrent suivre les adultes. S’occuper de la pêche pour les hommes. Quant aux femmes, ce sont elles qui attendent le retour des hommes et de leur « récolte ». Elles négocient, vendent. Soufi aimerait au moins inculquer aux enfants l’importance de savoir écrire et compter pour au moins se débrouiller dans leur quotidien. Il garde espoir.


 
 


Mercredi matin




Il est cinq heures. Café vite avalé. La pirogue est prête. Nous aussi. La voile de la pirogue s’ouvre dans le ciel encore noir de nuit. Le vent souffle un peu. Toujours un vent de nord-est puis nord-ouest. Longeons de superbes côtes. Sable blanc. Eau couleur vert lagon ou bien bleu lagon. Les Vezo partent en mer. Au loin, plein de points blancs. Ce sont les voiles. Elles paraissent énormes comme si en se rapprochant nous allions croiser de vieux gréements. Le vent faiblit de plus en plus. Nous sommes de plus en plus sceptiques sur notre avancée. Il faut compter deux jours pour faire une étape prévue ! Il nous reste encore beaucoup de kilomètres pour arriver jusqu’à Belo-sur-Mer. Si le vent se maintient comme maintenant, il va nous falloir plus de six jours. Mais nous n’avons plus assez de temps. Il nous faut prendre une décision. Là, maintenant. Faire demi-tour et retourner à Tuléar. Félix borde alors la voile. Cap au sud. Et là, nous avons le vent dans le dos. La voile se gonfle, devient énorme. La pirogue file ! En deux heures de temps, nous faisons ce que nous avons fait ce matin en six heures !! Il commence à se faire tard. Nous cherchons un lieu pour faire étape. Quelques bungalows de luxe. Le propriétaire est un blanc. Il nous demande une somme exorbitante pour dormir sur la terrasse !! Plus loin, d’autres bungalows. Nous sommes accueillis par un malgache. Il est en train d’ouvrir une structure pour accueillir une clientèle aisée. C’est le chantier. Finalement, il nous met à disposition son bungalow de travail pour la nuit. Beaucoup de générosité de la part de cet homme.

 
 
 
 

Jeudi matin
 
 


 
Il est six heures. Nous levons le camp. Direction Tuléar que nous devons atteindre dans l’après-midi. Voile gonflée, la pirogue avance, avance. Fin d’après-midi, nous apercevons le petit port de Tuléar. Les charrettes attendent et guettent chaque pirogue qui rentre au port. Plus de 300 kilomètres parcourus. Nous sommes partagés dans nos émotions. Soulagés d’avoir pris une décision qui nous parait la plus sage et à la fois quelque peu déçus de n’être pas arrivés à notre ultime destination, Belo-sur-Mer. Aussi, il nous reste ce que nous avons vécu pendant ces quatre jours en mer, la beauté de la côte, la richesse des eaux et leurs couleurs, les pêcheurs Vezo et leur symbiose avec l’environnement dans lequel ils vivent.
 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire